Thursday 28 January 2021, 13:16
Avant le procès criminel, les victimes bénéficient de plusieurs droits. Malheureusement, bien souvent, elles n’en sont pas informées. Voici donc les droits dont bénéficient les victimes avant le procès. Ce texte est le premier d’une série de quatre articles portant sur les droits des victimes à différentes étapes du processus judiciaire.
Les victimes ont le droit de demander à la police de l’information sur l’enquête effectuée, que ce soit sur son avancement ou encore sur sa conclusion (1). La police doit d’ailleurs informer les victimes lorsqu’elle procède à une arrestation. La victime peut choisir le moyen qui lui convient le mieux pour recevoir l’information de la part de la police. Par exemple, cela peut être par l’envoi de lettres, de courriels ou de textos. Par contre, la victime peut aussi choisir de ne pas être informée par la police si elle juge que cela n’est pas dans son intérêt, notamment si cela la fait craindre pour sa sécurité.
Les procureurs de la Couronne doivent informer les victimes tout au long du processus. Ils doivent les tenir au courant des décisions qui les concernent, du nom et des coordonnées du procureur en charge du dossier et, en cas de remise en liberté de l’accusé, des conditions imposées par la Cour et de toute modification de celles-ci (2).
En cas d’infraction à caractère sexuel, le procureur est obligé de rencontrer la victime avant d’autoriser une poursuite (3). Dans un cas où le procureur décide de ne pas autoriser de poursuites, il doit expliquer à la victime pourquoi il a fait un tel choix (4). Il le fera lors d’une rencontre ou d’un appel téléphonique. Dans le cas d’un crime à caractère sexuel, le procureur a l’obligation d’informer la victime des raisons motivant son choix de ne pas poursuivre (5). Il doit, par la suite, s’assurer que la victime comprenne bien les explications qui lui sont fournies (6).
ll importe de préciser que le procureur de la Couronne n’est pas l’avocat de la victime. Il doit veiller à la saine administration de la justice et il prend ses décisions selon l’intérêt public, donc elles peuvent parfois être contraires à l’intérêt des victimes (7). Celles-ci ont tout de même le droit de donner leur point de vue sur les décisions prises lorsqu’elles ont une incidence sur leurs droits (8). Le DPCP devra alors le considérer (9).
Dans les cas d’infractions à caractère sexuel, le dossier sera attribué, dans la mesure du possible, à un procureur ayant subi une formation en la matière (10). Il s’agira également de la même personne du début à la fin du processus afin de créer et de maintenir un lien de confiance ainsi que de limiter les intervenants impliqués (11).
Le procureur, avant d’autoriser les poursuites, rencontrera la victime pour expliquer le déroulement du processus, connaître ses attentes et l’informer sur les mesures de protection et d’aide au témoignage disponibles (12). De plus, dans un délai raisonnable avant le jour de l’audition, le procureur rencontre la victime pour notamment l’informer du déroulement du procès, répondre à ses questions et à ses préoccupations et la préparer adéquatement préalablement à l’audition devant le tribunal (13). Dans le cas où la rencontre a pour but de discuter des faits relatifs à l’affaire, la personne ne pourra pas se faire accompagner (14).
De plus, le procureur de la poursuite s’assure que la date du procès soit fixée en priorité afin d’atténuer le stress que les victimes ressentent par rapport à la situation (15). Dans le même ordre d’idée, il s’oppose aux demandes de remise ayant pour but de retarder le procès, toujours dans l’optique de diminuer la période d’attente qui peut s’avérer très angoissante pour les victimes (16).
Lors des enquêtes, quand la police recueille les faits auprès des victimes, elle leur donne l’opportunité de remplir le formulaire de la déclaration sur l’impact du crime (disponible en ligne: Déclaration de la victime (SJ-753B) – Ministère de la justice). Elle informera également de la possibilité de lire elles-mêmes cette déclaration au juge et de se faire accompagner d’une personne de leur choix lors de la lecture. Si la déclaration n’a pas été faite auprès de la police, le procureur de la Couronne donnera également la possibilité à la victime de la remplir.
Les victimes auront le droit d’assister à l’enquête sur remise en liberté. Elles peuvent aussi participer à l’enquête préliminaire s’il y en a une. Cette étape peut s’avérer être la dernière occasion pour la victime d’assister au processus si par la suite le juge décide qu’il n’y a pas assez de preuves pour faire un procès ou que l’accusé plaide coupable. Il est donc important pour les victimes voulant s’impliquer de le faire le plus tôt possible, à la condition qu’elles le désirent et qu’elles soient prêtes évidemment.
Il est à noter que plusieurs ressources existent afin d’aider les victimes à toutes les étapes du processus:
(1) Charte canadienne des droits des victimes, article 7.
(2) Directeur des poursuites criminelles et pénales, Services aux citoyens.
(3) Directeur des poursuites criminelles et pénales, Directive ACC-3 révisée, par. 16(2).
(4) Directeur des poursuites criminelles et pénales, Directive ACC-3 révisée, par. 42.
(5) Directeur des poursuites criminelles et pénales, Directive ACC-3 révisée, par. 42.
(6) Directeur des poursuites criminelles et pénales, Directive ACC-3 révisée, par. 42. De plus, le procureur informe la victime ou, le cas échéant, le parent ou tuteur de l’enfant, lorsqu’il envisage de procéder à un arrêt des procédures dans un dossier:Directeur des poursuites criminelles et pénales, Directive NOL-1, article par.7.
(7) Directeur des poursuites criminelles et pénales, Directive VIC-1, par.5.
(8) Charte canadienne des droits des victimes, article 14.
(9) Directeur des poursuites criminelles et pénales, Directive VIC-1, article. 19.
(10) Directeur des poursuites criminelles et pénales, Directive AGR-1, par. 4(1).
(11) Directeur des poursuites criminelles et pénales, Directive AGR-1, par. 4(2).
(12) Directeur des poursuites criminelles et pénales, Directive AGR-1, par. 6.
(13) Directeur des poursuites criminelles et pénales, Directive AGR-1, par. 8.
(14) Directeur des poursuites criminelles et pénales, Directive AGR-1, par. 8.
(15) Directeur des poursuites criminelles et pénales, Directive AGR-1, par. 9.
(16) Directeur des poursuites criminelles et pénales, Directive AGR-1, par. 9.
(17) Voir Déclarations de la victime – Fiche d’information. Voir également Amissi Melchiade MANIRABONA, Introduction au droit des victimes d’actes criminels au Canada, Montréal, LexisNexis Canada, 2020, p. 182.
Anaïs Renaud
Étudiante en droit à l’Université de Montréal et stagiaire-étudiante chez Juripop